Pourquoi regarder un match de foot avec des enfants n'est pas une bonne idée...

Lorsque notre village a organisé une retransmission du match France-Pérou dans la salle des fêtes, nous nous sommes tout de suite dit que ce serait quand même hyper sympatoche d'y aller avec les enfants. Il y aurait sûrement d'autres familles que nous connaissons, donc des copains potentiels des garçons. Quel moment familial nous allions vivre! Quel partage père-fils (oui parce que moi le foot c'est pas trop mon truc)! Bref, nous allions écrire encore une belle page de notre livre familial.

Oui mais voilà, tout ne s'est pas passé exactement comme prévu.

17h: nous arrivons dans la salle. Numérobis crie déjà famine (alors qu'il vient de goûter copieusement, comme les traces de chocolat sur son front en témoignent).

17h02: Numérobis pleure car la buvette n'est pas encore ouverte. Quelle idée quand même de ne pas proposer les hot-dogs pour le goûter! Note pour plus tard: écrire au maire sur ce sujet.

17h07: après avoir réussi à calmer Numérobis, nous nous installons enfin. Les garçons vont s'asseoir devant. Ouf! Ils retrouvent des copains. Allez c'est parti!

17h09: les garçons en ont déjà assez et ont décrété que le foot c'était nul, et puis d'ailleurs c'est quoi le Pérou? Et puis pourquoi ils ne marquent pas? Et puis le foot c'est caca boudin.

17h10: ils sortent en trombe de la salle avec les copains. Je les suis comme je peux. Un père de famille me sourit. Je dois le connaître mais pas le temps. Ils sont où??

17h12: ça y est! Je les ai retrouvés! Ils sont partis jouer au foot avec leurs copains. Ah oui, parce qu'en fait le foot c'est plus caca boudin.

17h 45: je me dis qu'effectivement le foot c'est caca boudin, surtout joué par des enfants. Je me dis que d'autres parents auraient pu venir prendre le relais pour surveiller leurs enfants mais visiblement on m'a tatoué 'bonne poire' sur le front pendant mon sommeil.

17h46: ça y est c'est la mi temps. Jules s'est souvenu de notre existence. La France mène un but à zéro. C'est chouette, je pleure de joie non pas pour le score mais parce que je peux enfin aller aux toilettes.

18h00: nous arrivons péniblement à traîner les garçons à l'intérieur en leur promettant de la nourriture servie dans les 5 secondes.

18h02: Junior veut un hot-dog comme nous lui avions promis mais la machine est en panne. Junior change de couleur. La crise est proche. Nous négocions en échange un fameux, un délicieux, un exquis jambon-beurre, le nec plus ultra de la gastronomie française. Ouf ça passe! Numérobis suit le mouvement.

18h03: nous nous réinstallons. Les garçons mangent leur sandwich. Le sol commence à luire comme une patinoire de corps gras. Pourvu que personne ne glisse et nous traîne en justice.

18h10: après avoir mangé un peu plus des 3/4 du sandwich et avoir fait des 'miam', 'mmmh' à répétition, Numérobis décrète qu'il n'aime pas le beurre et commence à l'étaler méticuleusement sur le sol.

18h11: Jules, accroupi, nettoie le sol, sous les regards réprobateurs des autres parents qui eux ont des enfants parfaits.

18h15: la maman d'une des meilleures amies de Junior arrive avec sa fille. Je la connais depuis 4 ans. Les enfants font régulièrement des anniversaires ensemble. Elle ne m'a jamais dit bonjour.

18H16: la maman laisse sa fille avec Junior. Elle me serre la main en se présentant. Je comprends qu'elle vient de nous refourguer sa fille.

18h17: je vois la maman au bar en train de siroter une bière et rigoler avec ses copines.

18H18: la petite fille se met à pleurer. Elle veut sa maman. 'Mais non ma chérie, ta maman ne t'a pas abandonnée'. En fait si, elle t'a lâchement larguée comme une vielle chaussette et tu vas sûrement devoir faire quelques séances de psy pour oublier.

18h19: je retrouve la maman qui est vraiment désolée. Non vraiment. Sincèrement. Réellement.

18H20: je suis assise depuis 5 secondes quand les garçons se rendent compte à nouveau que le foot c'est caca boudin.

18h21: je les retrouve dans la grande salle qui se prépare pour la fête de la musique. Tous leurs copains arrivent.

18h22: la salle s'est transformée en cour de récré. Ils sont tous là. Plus énervés les uns que les autres. Où sont les parents? On me demande si je sais jouer à 1,2,3 soleil. Est-ce que tu sais compter jusqu'à 10? Tu peux aller te cacher? Tu sais faire le totem?

18h23: j'hyperventile. Je me dis que l'enfer c'est peut être ça...?

18h30: Jules prend pitié de moi en voyant mon visage pâle. Nous gérons tous les 2 tant bien que mal.

19h: ça y est le match est fini. Les parents arrivent. Ils ont passé un super moment tous ensemble. Super match. Très bonnes bières. Heureux je vous dis!

19h02: nous sommes dans la voiture. Junior et Numérobis hurlent. Ils ne veulent pas rentrer. Ils veulent voir le concert et danser jusqu'au bout de la night. Nous nous retournons. Ils voient nos regards de la mort qui tue. Ils se taisent.

19h45: ça y est ils sont au lit. Je m'effondre sur le canapé. Jules végète sur la terrasse et regarde un résumé du match vu à moitié.

20h15: je me suis endormie.

Alors peut-on regarder un match de foot avec des enfants? Sûrement, mais pas avec les nôtres!